vendredi 12 juin 2015

Quand le mariage à l'essai provoquait le courroux des curés

Avant 1792, les registres paroissiaux sont les principales sources connues de l'état civil. Les actes sont répertoriés dans ce qu'on appelle communément les BMS pour Baptêmes, Mariages et Sépultures. J'ai déjà évoqué ici les différences de "styles" entre rédacteurs chargés de la tenue des registres.

Avec les curés, c'est encore plus savoureux quand on sent poindre une certaine désapprobation entre les lignes... Ainsi de l'extrait ci-dessous retrouvé à Aussurucq.   
  
L'an mil sept cent soixante dix neuf et le premier du mois de novembre est née une fille des œuvres illicites d'Arnaud, fils illégitime de Pierre de beheragaray dit Sagardoy et d'Engrâce cadette d'appechetz (sic) d'Ossas - elle a été baptisée le lendemain par moy soussigné - le parrain a été Arnaud de beheragaray dit Goyhen et la marraine Anne d'appechetz d'Ossas, Dame de Bedacarrats de ce lieu ; on lui a donné pour nom Anne. Le parrain et la marraine ont point signé pour ne savoir écrire - Recalt curé.

Pour la petite histoire, le curé Récalt est un lointain parent. Je l'ai déjà évoqué dans l'histoire des deux orphelines et l'église d'Aussurucq. De leur côté, la jeune mère de cette enfants née d’œuvres "illicites" est très probablement la petite-fille de Marie Apeceix d'Ossas, mon aïeule (sosa 149). On notera au passage que le père, Arnaud, est lui même un enfant illégitime quoique reconnu. 

En effet, chez les Basques, le mariage à l’essai était monnaie courante [...]. Ce mariage à l’essai (concubinage) provoquait la colère des curés. Les Basques l'ont pratiqué avant l’heure. Ils ne rédigeaient de contrat de mariage et ne recevaient la bénédiction nuptiale qu’après avoir longtemps vécu avec leurs futures épouses, avoir sondé leurs mœurs et vérifié leur fertilité.*

Ceci n'est bien sûr pas une généralité. J'ai jusqu'à présent trouvé plus d'actes de naissance d'enfants de couples mariés que le contraire. Il arrivait aussi qu'un ou deux enfants nés hors mariage soient reconnus au moment du mariage de leurs parents et mentionnés dans l'acte de mariage. Mais quand on connaît l'influence de la religion catholique et celle des prêtres dans la société basque, on s'amuse rétrospectivement de ces petites entorses à la morale chrétienne...

*In "Matriarcat Basque : la position centrale de la femme chez le plus ancien peuple européen" (auteur non identifié)

Illustration : Enrique  Albizu

2 commentaires:

  1. Bonjour Marie !
    dans l'extrait que tu cites, il est écrit : "après avoir longtemps vécu avec leurs futures épouses". Par hasard, as-tu une idée de ce que recouvre ce "longtemps" ?

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  2. Non Hélène, je n'ai pas la réponse. A vrai dire, je ne me sens pas très à l'aise avec cette citation que j'ai trouvée sur un site mais sans que ne soit mentionné l'auteur. Même si le mariage "à l'essai" existait bien au Pays basque, le plus souvent en accord avec les familles, ce n'était pas la règle.
    J'ai bien trouvé quelques enfants illégitimes (mais dont le nom du père figurait sur l'acte !) et aussi quelques reconnaissances a posteriori mais comme je le précise dans mon billet, ce n'est pas la majorité des cas.

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